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Alain et Didier en mission en Tanzanie - saison 2 (2022)
23 juin 2022

Retour à Dar Es Salaam

Aujourd'hui, on rentre à Dar Es Salaam. Grosse journée de voiture, comme à l'aller. Environ 12 heures de route. Michael a proposé un départ à 5h du matin pour qu'on puisse s'arrêter en route à Bagamoyo. C'est une ville avec de vieux batiments coloniaux. Comme c'est sur la route, ça vaut la peine de prendre le temps de la visiter. Didier et moi mettons nos réveils vers 4h45. Douche. Bouclage des valises. On est prêts à 5h. Pas de signe de vie de Michael. On papote. 5h30. Didier m'informe que la veille, Michael est allé manger avec un de ses frères d'Arusha. Je sens le plan foireux. Style, il s'est couché à 4 heures du matin. Du coup, on emballe le matériel et on arrive à trouver deux motos en location. Direction Dar Es Salaam.

Non, c'est une blague. Plusieurs de nos contacts nous ont cru quand on a envoyé cette photo prise par Didier. On a bien rigolé.

A 8h, Didier et moi déjeunons comme d'habitude. Aika, la serveuse du lodge est surprise de nous voir encore là car nous lui avions dit que nous partirions tôt. C'est vraiment quelqu'un de sympa qui ne parle que Swahili. C'est bien, ça m'a fait progresser et surtout, ça l'a fait bien rire car je confonds plein de mots, j'inverse des syllabes.

Lors des élections législatives françaises, Rachel Kéké, de la France Insoumise, a été élue députée. Elle est femme de ménage, syndicaliste. J'en avais parlé à Michael qui avait trouvé cela hallucinant. Je lui ai expliqué qu'en France, on peut avoir reçu une bonne éducation scolaire mais être femme de ménage. C'est pas le cas ici. Une grosse partie de la population n'est pas allé du tout ou assez à l'école pour espérer avoir un boulot intéressant. Beaucoup font de la manutention, du gardiennage, du ménage, de la vente ambulante... Des milliers de petits boulots de survie. Même si il n'est pas parfait et même si il est un peu en crise, notre système éducatif est à des années lumières de ce qui se passe ici. Aika n'a aucune chance de faire autre chose que de nettoyer des chambres et faire la cuisine. Aika députée ! Ca dépasse l'entendement ici.

Vers 9h, Michael émerge. Il est déchiré. Il déjeune et nous prenons la route vers 10h. Pour rattrapper un peu notre retard, Michael roule comme un Fangio. Bilan. Il se prend une prune pour excès de vitesse : la police fait des controles avec des radars mobiles. Au lieu des 30 000  TZS d'amende officielle, il glissera un billet de 5 000 TZS au policier qui indiquera que c'est pas assez. Il rajoutera 10 000 TZS. Ni vu ni connu. On repart. Moins d'une heure après. Rebelote. Cette fois c'est un franchissement de ligne blanche. De façon généralisée, personne ici ne respecte ce marquage. Un peu par habitude néfaste, un peu par nécessité car il y a parfois des camions chargés comme des mules qui roulent à moins de 20 km/h quand ça monte : ça serait presque dangereux de rester coincé derrière. Bref. Nouvelle prune mais cette fois, rien à faire car c'est un gradé qui a signalé l'infraction. En fait, on est sur la route des grandes réserves naturelles et aux abords du Kilimandjaro. La police veille sur cette artère vitale qui draine des milliers de touristes. Arrivés à Moshi, nous descendons vers le sud et on rejoint alors les grandes plaines du FarEast. Plus de flics et surtout, beaucoup moins de circulation. Michael me demande de prendre le volant et j'accepte. Pas évident de conduire à gauche, avec une voiture à vitesse automatique sur des routes cabossées avec de tout sur la route : des piétons, des vélos, des motos, des anes, des troupeaux, des enfants, des trous, des ralentisseurs de 30 cm de haut... Je dois mobiliser toute mon attention pour m'intégrer dans la circulation. Dans les commandes du tableau de bord, tout est inversé. Un coup sur deux, j'active les essuis glaces au lieu du clignotant. Aux ronds points, je dois rester super vigilant car on tourne à l'envers. Je dois faire gaffe aux priorités ... à gauche. Aux intersections, quand on tourne à droite, faut que je me rappelle de me mettre sur la voie de gauche... Un exercice mental et moteur épuisant. Heureusement, Didier est à coté et on papote. Michael finit sa nuit à l'arrière.

A un moment donné, je dois doubler un camion, ce que je fais. Je suis donc sur la voie de droite. J'aperçois alors sur la voie de gauche une chèvre au milieu de la route. J'ai pas vu si le camion l'a évité, si elle a fait un saut de cabri ou si elle a finit dans le pare-choc. J'ai pas vu. Si j'avais pas doublé, je ne sais pas si j'aurais eu le réflexe de l'éviter. Curieusement, je n'ai jamais vu le moindre accident sur les routes. Les seuls cadavres d'animaux qu'on voit sont ceux de chiens (ou apparentés?). J'en parle avec Didier et on conclut qu'on n'en voit pas car ceux qui n'ont pas compris qu'il fallait rester bien au bord et ne pas s'aventurer sur la route ne sont plus là depuis longtemps. Sélection naturelle accélérée. Idem pour les humains.

A un moment donné, arrive ce que je redoutais. Un militaire me fait signer de m'arrêter. Je cafouille un peu en voulant mettre le clignotant, j'active les essuis-glaces car c'est inversé par rapport à nous. Je me gare au bord mais un peu à la tchétchène. J'arrive pas à trouver le bouton pour descendre la fenêtre... Le militaire me salue et me parle en anglais. Ouf. Je le salue. Je lui explique qu'on va à Dar Es Salaam. Il me demande d'où on vient. "Ufaransa". Son visage éclaire un beau sourire et il m'indique que les Français sont les meilleurs (en foot j'imagine), que nous sommes les bienvenus en Tanzanie et il me souhaite bonne route sans me demander mon permis. Car je n'ai que mon permis français qui date de 1988, c'est à dire le vieux format en papier rose avec une photo où j'ai 18 ans, les cheveux noirs, bouclés, mi-longs... Michael et Didier se moqueront de moi et traiterons le permis français de moyen ageux. En effer, les permis tanzaniens ressemblent à une carte bleue et sont renouvelés régulièrement. J'ai un permis international mais cette fois, je ne l'ai pas pris. Sans conséquence cette fois. Merci Zidane et Mbappé d'être les ambassadeurs de la France un peu partout.

Vers 18h30, le soleil se couche. A 19h30, c'est nuit noire. Je galère vraiment car la plupart de ce qui circule en bord de route n'a pas d'éclairage. D'autre part, il n'y a pas vraiment de marquage au sol à gauche. Comme je n'ai pas encore bien les dimensions de la voiture en tête, comme je dois inverser mes repères, comme je vois les obstacles au dernier moment, comme les voitures en face ont des phares un peu trop puissant, j'ai l'impression d'être dans un jeu vidéo sauf que là, c'est pour de vrai. Je me fais frayeur sur frayeur. Vers 20h, Michael prend le relai. Ouf.

En arrivant sur Dar Es Salaam, ça bouchonne. En fait, ça bouchonne 24h sur 24. Au départ, on voulait se rapprocher du centre ville pour être sur place demain matin. Mais comme il est 23h passé, on propose à Michael de nous laisser à un hotel sur sa route pour qu'il rentre chez lui le plus vite possible. On n'a pas eu non plus le temps de faire un point, notamment financier. C'est très important car les tractations financières peuvent ruiner des collaborations. En fait, notre budget ne tient pas la route : soit on travaille aux frais réels mais il faut alors toutes les factures, ce qui est impossible en Afrique;  soit on travaille au forfait mais alors il faut tout intégrer dans le forfait journalier : logement, repas, ET transports intérieurs, dédomagement des participants... Or, dans le budget que Michael a proposé à Didier et que je n'ai pas vraiment vu, il a prévu à la fois un per diem (dédomagement forfaitaire) mais il fait aussi apparaitre l'utilisation de sa voiture comme location, le gasoil, le dédommagement des sujets. Brefs, ces derniers frais sont comptés deux fois et doivent être intégrés dans le per diem, ce qui va considérablement réduire le per diem résiduel. Au lieu d'avoir 200 € par jour pour trois, nous n'aurons que 100 € pour trois car l'autre moitié est bouffée par les frais de transport et d'expérimentation. 30 ou 40 € par jour par personne, c'est assez pour se loger dans un lodge africain (pas un hotel européen) et manger à l'africaine mais ce n'est pas ce qu'espérait Michael. Va falloir négocier. Ferme.

On trouve finalement un hotel très étrange, hyper moderne en apparence, paumé au milieu de nulle part. Vose Hotel. Probablement un investissement sur les hauteurs de Dar Es Salaam, peu exploitées pour le moment mais qui pourraient flamber dans le futur ? On s'installe rapidement, on mange un bout. Puis j'étudie le bilan financier avant de me coucher pour une bonne nuit.

 

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Alain et Didier en mission en Tanzanie - saison 2 (2022)
  • En juin 2022, Didier Demolin et Alain Ghio partent en mission de terrain en Tanzanie. L'objectif est de recueillir avec des appareils de laboratoire des enregistrements de parole chez les Massai.
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